By Corine Lesnes
Le MondeApril 2, 2004
Les lecteurs du Monde le savent depuis longtemps, mais ceux de la presse américaine n'en sont pas souvent tenus informés : les entreprises américaines, aussi, obtenaient des contrats en Irak et sont susceptibles d'avoir versé, comme tout le monde, la commission de 10 % au régime de Saddam Hussein.
Les firmes américaines avaient peu de chances d'íªtre choisies par les Irakiens. Elles passaient par leurs filiales étrangí¨res, et notamment franí§aises. Comme l'a rappelé l'état-major de l'ONU, le programme "Pétrole contre nourriture" était dirigé par un comité (dit "comité 661") dépendant du Conseil de sécurité. Son objectif était de contrí´ler les biens entrant en Irak pour empíªcher que Saddam Hussein ne réarme. Les commandes étaient passées par les Irakiens et payées par les recettes du pétrole, qui étaient maintenues sur des comptes séquestre.
Tous les contrats des fournisseurs de l'Irak étaient examinés et approuvés í l'unanimité des 15 pays, et donc des Etats-Unis. Le prix du pétrole vendu par l'Irak était aussi fixé par ce comité. Comme l'a souligné Shashi Tharoor, l'un des proches de Kofi Annan, dans une réponse au Wall Street Journal, ce n'était un mystí¨re pour personne que le régime irakien "soutirait des pots-de-vin de ses fournisseurs et des acheteurs de pétrole. (...) Mais ces fonds eux-míªmes ne passaient pas dans le systí¨me de l'ONU". Le programme a été audité "plus de cent fois", a-t-il ajouté.
Droit de Réponse
Qui a appliqué une surfacturation ? Qui a empoché la différence ? La Cotecna a-t-elle fermé les yeux et certifié conformes des expéditions qui ne l'étaient pas ? L'enquíªte le dira peut-íªtre. De bonne source, on indique que certains contrats franí§ais d'entreprises de communication sont en cours d'examen. Sans avoir fourni de preuves concrí¨tes, la presse conservatrice américaine, avec une certaine ardeur, met en cause la France. L'ambassadeur í l'ONU, Jean-Marc de La Sablií¨re, a envoyé, cette semaine, au New York Times un droit de réponse í un éditorial de William Safire.
Le diplomate rappelait ses prises de position en faveur d'une enquíªte. Il tentait aussi d'expliquer au lecteur américain que la BNP n'était pas la seule banque "irakienne" de l'ONU (l'américaine Chase Manhattan gérait 41 % des ressources pétrolií¨res). Il rappelait aussi que, depuis le début du programme, en décembre 1996, jusqu'í son terme, en novembre 2003, la France n'a représenté "que" 8 % du total des contrats octroyés. En 2002, la France n'était plus que le 8e fournisseur de l'Irak (loin derrií¨re la Russie, apprend-on par ailleurs, et dans les dernií¨res phases, derrií¨re l'Australie). Ces précisions n'ont pas trouvé place dans la lettre qui a été publiée. Les diplomates se sont entendu dire que de telles affirmations méritaient d'íªtre "vérifiées".
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