11 juin 1996
Déclaration de S.E. Tono Eitel Ambassadeur Représentant Permanent de l'Allemagne auprí¨s des Nations Unies devant le Groupe de travail í composition non limité sur la question de la représentation équitable au Conseil de sécurité et de l'augmentation du nombre de ses membres ainsi que d'autres questions ayant trait au Conseil de sécurité
Monsieur le Président,
ce n'est pas la premií¨re fois que notre Groupe discute les méthodes de travail du Conseil de sécurité. Cela n'est pas étonnant d'ailleurs. Le sujet est essen tiel. Il mérite d'íªtre examiné en toute profondeur. C'est l'un des deux sujets qui sont í la base du mandat complet et cohérent de notre Groupe de travail. Nous y attachons une importance particulií¨re. Depuis 1994, l'Allemagne a activement contribué í sa discussion - je me permets de mentionner nos déclarations du 8 et 22 Avril 1994 ainsi que celles sur les rapports du Conseil de sécurité de 1994 et 1995. D'autres délégations ont soumis des déclarations et documentations im portantes au Groupe. Parmi ces documents figurent les deux propositions des pays non-alignés et des pays scandinaves publiées dans le Compendium A/49/965 du 18 Septembre 1995, les documents de conférence CRP. 3 et 4, ce dernier étant le fruit d'une idée de la délégation autrichienne, la proposition de l'Argentine et de la Nouvelle-Zélande contenue dans le CRP. 8 et, finalement, la proposition trí¨s inté ressante de la délégation Tchí¨que, visant í une interprétation plus extensive de l'Art. 31 de la Charte.
La semaine dernií¨re, plus d'une trentaine de délégations ont commenté sur les propositions mises en discussion. Le débat a été vif et beaucoup a été dit déjí . De ce fait et étant donné la richesse d'éléments dont nous disposons maintenant, je vais me limiter í quatre points qui me paraissent essentiels:
1. L'importance du sujet pour l'Allemagne
2. L'interdépendance entre Cluster I et II
3. Les domaines prioritaires du Cluster II
4. Les prochaines étapes
M. le Président,
la réforme des méthodes de travail du Conseil de sécurité revíªt une im portance particulií¨re pour l'Allemagne. C'est lí le domaine oí¹ le terme de démo cratisation du Conseil de sécurité, si on veut l'employer dans le contexte multi latéral, gagne un sens et un poids tout particuliers. Parler de démocratisation dans ce contexte veut dire: Assurer une participation aussi large que possible des Etats- Membres aux travaux du Conseil. Cela vaut surtout, quand les intéríªts d'un ou plusieurs Etats-Membres sont directement concernés. Les éléments de ce prin cipe de participation se trouvent partout dans la Charte. Il suffit de regarder atten tivement les articles 10, 12, 31 ou 32 de la Charte. Nous sommes d'avis, que le principe de participation doit íªtre rendu le plus opératoire possible.
Evidemment, tout principe, y compris celui de participation, connaí®t des limites inhérentes. Dans le cas présent, deux limites ne peuvent pas íªtre ignorées: a) les compétences explicites que la Charte confí¨re í un organe et b) le besoin de garantir l'efficacité et la capacité d'agir du Conseil de sécurité. Le distingué Déle gué du Canada a souligné la semaine dernií¨re que le but de cette réforme est de rendre le Conseil plus fort et capable de réagir aux exigences du présent. Je n'ai rien í ajouter í cela.
L' Allemagne est un membre relativement jeune des Nations Unies. Nous avons été admis en 1973. Depuis ce temps-lí , nous faisons partie des nouvelles réalités de l'Organisation. C'est un fait, que nous n'avons jamais pu participer aux processus de réforme de la Charte des Nations Unies. Et comme de nombreux pays, l'Allemagne a passé de longues années devant la porte du Conseil de sécu rité. C'est pour cela que nous nous sentons solidaires avec tous ceux, qui, pour quelle raison que ce soit, n'ont pas eu d'accí¨s régulier, ou míªme pas du tout, au Conseil, en particulier les pays de taille moyenne ou petite. Les problí¨mes et les sentiments d'un pays non-membre du Conseil nous sont donc connus et proches et sont aussi les ní´tres. Toute réforme doit aussi servir leurs intéríªts. Pendant notre présidence du Conseil l'année dernií¨re, ma délégation a déployé des efforts par ticuliers, pour garantir l'information des pays non-membres du Conseil sur une base quotidienne. Nous avons fait de míªme en ce qui concerne le comité de sanc tions auquel nous présidons. Plus, dans les derniers mois, nous avons contribué substantiellement í l'initiative argentine visant í améliorer les mécanismes de co ordination entre le Conseil et les pays contributeurs de troupes. Ainsi, de ma nií¨re conjointe, nous avons pu mettre au point le texte d'une nouvelle déclaration présidentielle du Conseil. Nous croyons que l'on peut encore faire beaucoup mieux et beaucoup plus. Ma délégation va donc poursuivre de manií¨re énergique ses efforts dans cette direction. Si les Etats-Membres décident d'accorder un nouveau statut í l'Allemagne au sein de l'organisation, nous essayerons de re doubler nos efforts í cet égard sur une base permanente í l'intérieur du Conseil.
M. le Président,
les sujets traités dans les Cluster I et Cluster II de notre programme sont interdépendants. Ils ne se bloquent pas mutuellement. Ils ne sont pas alternatifs non plus. Il se complémentent dans leur substance. L'un est nécessaire pour l'autre. Aucun peut avancer avec succí¨s, sans que l'autre le fasse aussi:
D'une part, il y a le Cluster I: lí , le but est de rendre le Conseil plus effi cace, plus fort, plus représentatif des régions et des "acteurs globaux". Pour arri ver í cela, il faut une sélection, une concentration parfois et des actions responsables et rapides. D'autre part, il y a le Cluster II: ici, le but est d'arriver í plus de transparence, í plus de participation, avoir plus d'acteurs sur la scí¨ne, en acceptant que cela prenne peut-íªtre plus de temps et nécessite plus de coordina tion. Il me paraí®t exclu qu'on puisse ignorer l'interaction de ces deux éléments. Ce qu'il nous faut, c'est les harmoniser, les combiner et trouver un équilibre entre eux. Cela ne sera possible que grí¢ce í une vue d'ensemble et d'une décision globale.
On peut tirer la míªme conclusion lorsqu'on regarde les choses sous un angle stratégique. Si nous envisageons plus que de simples changements cosmétiques, si nous voulons vraiment aboutir í une transparence qui mérite son nom, il nous faudra combiner les propositions dites "Cluster II" avec celles du "Cluster I". Un paquet partiel, "í la carte", ne sera pas attrayant, ni pour beaucoup d'entre nous, ni pour les membres permanents. Leurs déclarations récentes me paraissent sans équivoque í cet égard. Le Représentant Permanent du Brésil a souligné la se maine dernií¨re que nous ne pouvons nous attendre í des changements de fond et des concessions dans un Cluster, si la contrepartie dans l'autre Cluster n'est pas connue en míªme temps. Ma délégation partage entií¨rement cette vue. Cette con statation me paraí®t valable pour nous tous. Et pour les cinq membres permanents en particulier.
Finalement, d'un point de vue juridique, le mandat de notre Groupe ne per met pas í notre avis d'accélerer une partie du mandat aux dépens de l'autre. Le mandat du Groupe découle clairement de son titre. Son titre se lit comme suit: "... examiner la question de la représentation équitable au Conseil de sécurité et de l'augmentation du nombre de ses membres, ainsi que d'autres questions ayant trait au Conseil de sécurité". A l'extrí¨me on pourrait míªme dire, que le mandat pri vilégie les aspects du Cluster I, parce qu'ils sont mentionnés en premier lieu. Ma délégation ne va pas si loin que í§a. Mais elle insiste sur le parallí¨lisme du traite ment des deux Clusters. C'est d'ailleurs pourquoi nous ne partageons pas les vues exprimées dans le premier paragraphe du papier CRP 8, qui essaie d'établir une différence d'importance entre les deux Clusters.
M. le Président,
les domaines du Cluster II qui nous sont chers et paraissent prioritaires sont les suivants:
1. Des séances d'information substantielles et quotidiennes par le Président du Conseil de sécurité;
2. Des rapports plus analytiques du Conseil de sécurité;
3. Des séances d'informations substantielles par les Présidents des Comités de sanctions; l'actualisation des rí¨gles de procédures de ces comités quand nécessaire;
4. Des séances officielles publiques, "ouvertes", du Conseil de Sécurité plus fréquentes;
5. Une interprétation plus extensive de l'Article 31 de la Charte suivant les lignes de la proposition Tchí¨que, qui permettra í un Etat-Membre d'exposer ses points de vues au Conseil, lorsque ses intéríªts sont concernés. Sur les míªmes lignes que celles exprimées par le distingué Représentant Per manent de la Suí¨de, ma délégation reconnaí®t également le besoin du Conseil de se réunir en composition limitée. A mon avis, les deux approches ne sont pas imcompatibles. S'il paraí®t opportun, notre Groupe pourrait de mander un avis du service juridique du Secrétariat sur la portée de l'Article 31 de la Charte;
6. Une coordination plus étroite entre les pays contributeurs de troupes et le Conseil de sécurité. La coordination doit íªtre plus efficace, régulií¨re et as surée. Elle ne devra pas se limiter aux débuts d'un mandat;
7. L'information plus rapide et plus complí¨te des Etats-Membres sur le pro gramme, l'ordre de jour annoté, et les décisions attendues du Conseil. A ces fins, l'utilisation des méthodes modernes de l'électronique nous paraí®t utile et míªme indispensable;
8. L'abstention, lorsqu' un membre du Conseil ou d'un comité est partie í un litige. Il nous semble que l'idée contenue dans l'Article 27 (3) de la Charte peut íªtre généralisée. En principe, si le membre d'un forum est directement concerné par un évenement spécifique, une certaine retenue nous paraí®t ap propriée dans la poursuite de ses intéríªts. Par exemple, s'il advenait qu'un membre assume la Présidence í ce moment, on pourrait penser í conférer la Présidence ad hoc í un autre pays. Ces idées pourraient aider í renfor cer la crédibilité et l'impartialité du Conseil.
Les points mentionnés ne sont pas exhaustifs. L'Allemagne est príªte í con sidérer la plupart des autres mesures proposées afin d'ajouter plus de transpa rence au travaux du Conseil í condition qu'elles garantissent un résultat concret dans la pratique du Conseil.
En ce qui concerne la question de formalisation et de l'institutionalisation des nouvelles mesures de transparence, nous sommes flexibles. Si c'est le voeu général des Etats-Membres, ma délégation n'a pas de problí¨me avec cela. Cepen dant, nous ne croyons pas qu'un problí¨me puisse se résoudre par simple formali sation. L'histoire des Nations Unies et de ses résolutions donne la preuve, comme nous le savons tous, du contraire. Le facteur décisif nous parait l'action concrí¨te et l'esprit dans lequel cette action est exécutée. C'est pour cela qu'il nous paraí®t approprié de suivre la suggestion faite par le Japon la semaine derniére, c'est-í - dire de procéder au cas par cas.
M. le Président,
en ce qui concerne nos prochaines étapes, ma delégation est d'avis qu'il nous faudra maintenant d'avantage de transparence interne en ce qui concerne la quantité énorme des propositions soumises í l'égard du Cluster II. Ma délégation propose donc que le Bureau évalue les plus récentes propositions et réactions des Etats-Membres, afin de les inclure, le cas écheant, ensemble avec les propositions du Compendium, sous une forme appropriée dans les listes du document CRP 4. Ce document dont les droits intellectuels et les mérites reviennent í la délégation autrichienne nous paraí®t le meilleur structuré et le plus concret. De cette faí§on, nous pourrons arriver í un paquet complet, composé de Cluster I et Cluster II, ce dernier basé sur le document CRP 4.
Je vous remercie, M. le Président.